La sensation est incroyable. Les bras tendus, les yeux fermés, l’impression de d’être en chute libre est presque parfaite. C’est la fin du mois d’août 1995. Au sommet
du mont Colden, le vent souffle de façon soutenue à près de 100 km/h. Quelques semaines plus tôt, j’avais fait mon premier saut en parachute. Un saut de basse altitude, 4,000 pieds, avec quelques secondes de chute libre. Une expérience
fantastique. L’exaltation de se tenir au sommet d’une des hautes montagnes des
Adirondacks s’y compare. Colden, le onzième plus haut mont de la région,
s’élève à 4,714 pieds (1,436 mètres). Ce jour-là, c’est comme si un géant me
tient dans sa main.
Cette expérience a été le déclencheur de nombreuses autres randonnées dans les
Adirondacks (monts Marcy, Haystack, etc.), la région des White Mountains (mont Washington), Yosemite et San Bernardino en Californie, les parcs du plateau du Colorado (Bryce, Zion et Grand Canyons) et finalement une expédition de deux semaines dans l’Himalaya, région du Lang Tang au Népal.
Ensuite, les
obligations reliées au travail et les responsabilités familiales ont fait en
sorte que mes bottes de marche sont demeurées au sous-sol, inutilisées pendant
plusieurs années.
Mais les
Adirondacks, un parc de 6.1 millions d'acres situé au nord-est de l'état de New-York, ont toujours exercé sur moi une fascination particulière. Il n'y a plus beaucoup d'endroits sur la terre qui se présentent dans un état aussi immaculé. Un panorama de montagnes et de forêts à perte de vue. Une fois un sommet atteint, à tout
coup, on peut ressentir l’«ivresse des hauteurs». Ce subtil vertige des sens avec
lequel se mélange l’impression d’être sur le point de se voir investi d’un
quelconque secret primordial (d’autres diront qu’il s’agit simplement de
l’effet de la sérotonine sécrétée lors d'un effort physique intense…).
En juin 2011,
j’ai décidé de renoué avec les Adirondacks en entreprenant un trek de deux
jours avec mon fils Elliot, 11 ans à l’époque. Notre objectif était l’ascension
du Mont Marcy, mais en raison d’un bris d’équipement (mes vieilles bottes se
sont littéralement désintégrées sous mes pieds) nous avons rebroussé chemin.
Sur le
sentier du retour, en faisant la conversation avec deux autres marcheurs, j’ai
appris l’existence des «forty-sixers» (ADK46R). Il s’agit d’une confrérie de
marcheurs ayant grimpé l’ensemble des sommets de 4,000 pieds et plus du parc
des Adirondacks. Depuis 1918, près de 7,500 personnes ont accédé au club sélect
des 46ers. Le concept a enflammé mon imagination. Peu de temps après mon
retour, j’ai décidé d’entreprendre l’ascension des 46 hautes montagnes des
Adirondacks.
Pour
ajouter un peu de piquant, mon objectif est de compléter le parcours avant que
le club n’atteigne les 10,000 membres. J’ai aussi décidé de partir à zéro et
refaire les sommets que j’avais déjà gravis il y a quinze ans.
Le petit ruisseau qui longe le sentier menant à Bushnell Falls (juin 2011)
Le matin du deuxième jour, un petit chevreuil broutant autour de notre camp
Une pause au Johns Brook Lodge